vendredi 30 août 2019

29 août - Cape St. Mary's


Avant de prendre le bateau cet après-midi d’Argentia à North Sydney, nous nous rendons à Cape St. Mary’s pour voir les fous de bassan à l’extrémité sud de Terre-Neuve.  C’est une région de grandes étendues de végétation à ras le sol, typique de la toundra de l’Arctique.  Les rares villages sont au creux des vallées au bord de la mer et la route va d’un vallon à un autre.  Nous délaissons la route 100 pour prendre une route bien droite sur 13 kilomètres qui nous mène jusqu’au Centre d’accueil des visiteurs de la réserve de Cape St. Mary’s. 

Nous étions venus ici il y a 18 ans et la brume recouvrait toute la région.  Nous avions pris le sentier qui conduit aux rochers où nichent les fous de bassan mais nous les avions à peine aperçus, seulement sentis et entendus. Cette fois-ci, nous nous étions assurés de venir par temps clair et avions modifié notre itinéraire en conséquence. Plusieurs variétés d’oiseaux viennent faire leurs nids ici mais au moment de notre visite il n’y avait que les fous de bassan.

En allant voir les oiseaux

Le rocher des fous de bassan

D'autres locataires
Les hautes falaises verticales et l’isolement qu’offre la mer les protègent des prédateurs. La plupart des oiseaux de mer viennent ici pour s’accoupler et passent le reste de leur vie en mer. Les fous de bassan arrivent à Cape St. Mary’s aux alentours de la 3e semaine de mars et repartent en octobre pour la Nouvelle-Angleterre, même pour le nord de l’Amérique du Sud.  La femelle produit un seul œuf à la fin de mai et elle le couve jusqu’à l’éclosion.  En 3 ou 4 semaines le petit est couvert de plusieurs couches de duvet blanc. Un des parents est toujours présent dans le nid et le petit est nourri par les deux.  Au bout de 13 semaines les plumes du jeune deviennent brunes. En octobre, quelques jours avant de quitter le nid, le jeune fou de bassan bat des ailes fréquemment et finalement s’envole vers la mer en direction du sud. A chaque année, le couple revient au même nid pour s’accoupler. Le mâle arrive en premier pour sécuriser le vieux nid et le reconstruire avec des couleurs vives en utilisant des herbes de mer, de l’herbe, des plumes et de vieux filets de pêche. Et le cycle recommence. La plupart des fous de bassan s’accouple avec le même partenaire pour la vie.

Nous reprenons la route pour Argentia en début d’après-midi et traversons Placentia pour une dernière fois.  A 14h30, nous sommes en ligne pour l’embarquement.  Nous arriverons à North Sydney vendredi matin à 9h00.  Nous passerons une excellente nuit dans la cabine que nous avons réservée il y a quelques mois.
 
Un amoureux de cabanes à oiseaux, elle ne sont pas à vendre

Adieu Placentia / Plaisance

Nous garderons de merveilleux souvenirs des six semaines passées à Terre-Neuve.  Son histoire, celle de ses habitants et ses paysages à couper le souffle resteront dans notre mémoire longtemps. Vendredi nous ferons un arrêt au Nouveau-Brunswick et ensuite nous passerons quelques jours à Québec avant de retourner à la maison en Ontario. 

Nous vous remercions d’avoir pris le temps de nous suivre lors de ce voyage par l’intermédiaire de ce blogue et de nous avoir laissé des commentaires. C’est toujours un plaisir de vous lire.

jeudi 29 août 2019

28 août - Placentia, jour 2

Nous nous rendons à un autre boutte de route aujourd’hui, à Ship Harbour situé à 32 kilomètres au nord de Placentia. Il n'y a presque personne sur cette route montagneuse en ce matin pluvieux. 
Seven Island Lookout 
Et ce n’est pas un boutte de route ordinaire.  Nous délaissons la route asphaltée pour un chemin de gravelle et de pierres en nous demandant si nous sommes vraiment sur le chemin conduisant au site historique de Ship Harbour.  Je n’ai pas vraiment fait de recherche sur l’endroit, donc je n’ai aucune idée de ce qui nous attend.  Nous y découvrons une page d’histoire qui nous était méconnue. 

Au site historique de Ship Harbour
 En 1941 le Japon se joint à l’Allemagne et à l’Italie. Du coup, les États-Unis imposent au Japon un embargo sur le pétrole et l’acier, une décision qui accentue la tension diplomatique en Extrême-Orient.  L’attention d’Hitler est tournée vers l’Union soviétique; Churchill et Roosevelt décident de se rencontrer. Roosevelt embarque secrètement à bord du croiseur U.S.S. Augusta et, accompagné d’une flotte de destroyers, se dirige vers la côte de Terre-Neuve. Churchill traverse rapidement l’Atlantique à bord du cuirassé H.M.S. Prince of Wales, protégé par des destroyers canadiens venus d’Islande. Une importante base navale et aérienne américaine est en construction dans la baie Placentia. Ce lieu permet à Churchill et à Roosevelt de se rencontrer en privé et d’être protégés par de puissantes forces militaires.  Le 7 août, le U.S.S. Augusta mouille près de Ship Harbour et le 9 août le H.M.S. Prince of Wales le rejoint. Une flotte d’environ 20 navires militaires monte la garde auprès des deux bâtiments amiraux.  Le plus important accomplissement de ces rencontres est la déclaration conjointe des buts communs pour le monde de l’après-guerre. La Conférence de l’Atlantique prend fin le 12 août. Deux jours plus tard, on publie la Charte de l’Atlantique en référence à la déclaration conjointe du président et du premier ministre. Les principes de base établis et insérés dans la Charte de l’Atlantique constituent encore aujourd’hui des buts communs quant aux droits de la personne, à la paix et à la coopération internationale. En janvier 1942, 26 pays alliés signent cette « Déclaration des Nations Unies ». Ces pays deviendront le noyau de la grande organisation des « Nations Unies » dont la charte sera signée le 26 juin 1945.


Monument à l'éfigie de Churchill et Roosevelt

L'endroit où la  rencontre Churchill-Roosevelt eut lieu en 1941

Cuirassés Prince of Wales et Augusta au lieu de rencontre en 1941

En après-midi, nous nous rendons au site historique de Castel Hill sur la colline en face de Placentia. En premier lieu, nous voyons une exposition sur la pêche à Plaisance dans les années 1650. Après avoir visité tant de villages de pêcheurs, il était temps que nous comprenions comment ceux-ci procédaient de la prise des poissons, à la salaison et à la mise en marché avant la création des usines de transformation. A bord de leur chaloupe, les pêcheurs attrapaient le poisson un à la fois; une bonne prise journalière était d’environ 300 poissons par homme. Les photos suivantes décrivent les étapes effectuées jusqu’à l’expédition sur le marché de l’Europe.






Après le déclenchement de la guerre entre l’Angleterre et la France en 1689, le gouvernement français a commencé à prendre plus au sérieux la défense de la colonie de Plaisance. Entre 1690 et 1713, il a renforcé sa garnison et y a fait construire un réseau de fortifications et de batteries.  A l’aide d’un audioguide, nous visitons l’emplacement et les vestiges de Fort Royal et apprenons comment se déroulait la vie des soldats qui étaient mal payés et mal nourris à cette époque.

Les vestiges de Fort Royal construit par les Français

La batterie de Fort Royal devant Plaisance
Nous terminons notre visite de Placentia à la maison O’Reilly. Ce qui nous a le plus intéressé dans cette visite est l’exposé sur le déplacement des habitants des petits villages en zone éloignée qui s’effectua entre 1950 et 1977. Ce fut un déchirement pour grand nombre d’entre eux qui n’ont pas réussi à se faire une vie meilleure dans les plus grandes villes.  Pour les plus âgés, c’était toute leur vie qu’ils abandonnaient, tandis que pour les plus jeunes, c’était la chance d’avoir accès à une scolarisation plus poussée. Nous pouvons lire des témoignages touchants de plusieurs d’entre eux.

Chez les O'Reilly



mercredi 28 août 2019

27 août – Placentia

En route pour Placentia, nous nous arrêtons au Salmonier Nature Park pour notre pique-nique du midi. Nous découvrons un Centre très informatif sur les saumons de l’Atlantique et les animaux qui vivent dans les forêts de Terre-Neuve.  Je trouve tellement intéressant le cycle de vie des saumons dans cette partie du Canada, que je demande de l’information écrite aux responsables du Centre car je crois que ce serait un sujet très intéressant pour un projet d’école pour Maya, Camille ou Chloé. Les jeunes responsables du Centre sont tellement enthousiastes qu’ils m’impriment en couleur toute la recherche qu’ils ont dans leurs fichiers. Ici en Atlantique, les saumons peuvent vivre jusqu’à 9 ans, s’ils ne sont pas tués par les prédateurs, et faire jusqu’à deux fois le voyage de leur lieu de naissance jusqu’à la mer. 

Nous allons ensuite marcher le long du sentier de bois juste à côté du Centre.  Pendant que les animaux, caribous, aigles à tête blanche, faucons pèlerins, renards, orignaux, bernaches du Canada, et autres, sont en liberté, nous sommes bien protégés par des clôtures.

Sur le sentier de Salmonier Nature Park

Les caribous

Jolie clôture conduisant à la toilette

Les aigles à tête blanche

Un orignal  à la sieste

Les bernaches du Canada 
Nous arrivons à Placentia en fin d’après-midi. Le soleil a fait son apparition et nous en profitons pour aller marcher sur la promenade de bois devant la mer.  Nous soupons ce soir au restaurant The Three Sisters où se trouvent également un groupe d’Irlandais venus célébrer des retrouvailles; ça chante et ça joue de l’accordéon. Ici à Placentia, il y a une forte population irlandaise.  Pour une fois, Serge n’a pas commandé de fish & chips.

Avant de nous rendre au camping Sunset RV Park à Argentia, nous marchons un peu dans Placentia.  A l’origine, Placentia (Plaisance pour les Français) était la capitale de la colonie française de Terre-Neuve du début des années 1660 jusqu’à 1713.  A mesure que la pêche se développait, Plaisance devenait un point de rendez-vous pour les flottes françaises et basques. Cependant ce n’était pas une colonie vraiment prospère car son économie ne pouvait pas s’étendre au-delà de la pêche.  Les difficultés de la vie étaient aggravées par les raids des corsaires hollandais et anglais. Et bien sûr, on était en guerre avec les Anglais.  Un premier recensement en 1671 révèle que les premiers colons de Plaisance étaient originaires de la région du Poitou sur la côte ouest de la France. 

En 1713, la France perdit la Succession d’Espagne et au terme du traité d’Utrecht, les habitants de Plaisance  eurent le choix de prêter le serment d’allégeance à la couronne d’Angleterre ou de partir avec tous leurs biens.  Cela rappelle l’histoire de l’Acadie.  Toutes les familles partirent sauf quatre. La majorité des Plaisantins déménagèrent à l’Île Royale (île du Cap Breton). A Louisbourg, ils construisirent une colonie plus importante et ils se remirent à la pêche. Mais ce fut de courte durée…. La guerre de Sept Ans fait rage en Europe et Louisbourg est assiégée. La chute de la place pendant l’été 1758 annonce la perte du Canada français, Québec chute en 1759 puis Montréal en 1760.

26 août – Portugal Cove South

Tôt lundi matin à Ferryland, nous regardons dans la baie les pêcheurs arriver avec leurs camions et repartir en bateau. Il profite de cette belle journée car le temps va se gâter par la suite.  De notre côté, nous partons pour Portugal Cove South.

Nous faisons un arrêt en route à Bear Cove, le temps d’en apprendre un peu plus sur le tragique naufrage du 24 février 1918.  Le Florizel s’est échoué de plein fouet sur des récifs situés à environ 5 kilomètres au sud-est de cette pointe. Parmi les 138 passagers et membres de l’équipe, il y a eu seulement 44 survivants. Le Florizel avait quitté St. John’s dans la soirée du 23 février en route pour Halifax et New York. Il faisait mauvais temps, la visibilité était limitée et la glace épaisse. Après avoir navigué pendant 9 heures en direction sud, le capitaine changea de cap, persuadé d’avoir dépassé Cap Race. Ce fut une erreur fatale. Le capitaine Martin, qui a survécu au naufrage, fut tenu responsable et son certificat fut suspendu pour 21 mois.  Ce n’est que plus tard qu’il fut découvert que le capitaine n’était pas en faute.  L’ingénieur en chef avait réduit la vitesse du vaisseau dès qu’ils avaient quitté le port, outrepassant les ordres du capitaine d’aller à pleine vitesse. Cette action fit que le bateau avait parcouru moins de distance que le capitaine avait évaluée. La raison citée par l’ingénieur était qu’il voulait prolonger le voyage jusqu’à Halifax afin que le bateau accoste durant la nuit et ainsi lui permettre de visiter sa famille pendant qu’il était là. L’histoire ne dit pas quelle fut la condamnation infligée à l’ingénieur. Une plaque est érigée pour commémorer l’héroïsme des gens de Cappahayden et des communautés avoisinantes qui ont pris part au sauvetage des rescapés du naufrage.

Cape Race
Nous nous rendons ensuite au Centre d’Interprétation Edge of Avalon à Portugal Cove South où nous avions réservé un tour guidé à Mistaken Point, l’endroit où furent découverts des fossiles en  1968. Les scientifiques y ont relevé plus de 6 000 fossiles représentant environ 30 espèces différentes. Pour s’y rendre, nous partons en voiture sur la route qui conduit à Cape Race. Nous nous stationnons au bout de 30 minutes, puis marchons pendant 1 heure le long d’un sentier qui longe le bord de mer jusqu’au site des fossiles.  Pour protéger le site, nous devons enlever nos chaussures et porter des bas remis par la guide.  Celle-ci nous donne les noms scientifiques des fossiles, que naturellement nous n’avons pas retenus, mais nous pouvons les photographier à volonté.  Nous laissons aller notre imagination pour visualiser les fonds marins où  se trouvaient ces espèces vivantes il y a  565 millions d’années qui ont été ensevelies et qui ont refait surface.

A Mistaken Point, les sapins sont petits

9 km aller-retour pour se rendre aux fossiles

Le site des fossiles à Mistaken Point


En pied de bas à la recherche des fossiles

Un fossile vieux de millions d'années


Nous sommes vieux mais pas encore des fossiles
Nous nous installons pour la nuit en camping libre près d’une aire de pique-nique en face du Centre d’interprétation. Nous avons un merveilleux coucher de soleil mais le temps sera à la pluie et venteux pour les deux prochains jours.  Nous ne prenons pas de chance et dormons le toit baissé.

En camping libre à Portugal Cove South

lundi 26 août 2019

25 août - Ferryland

Dimanche, c’est jour de fête.  Nous nous rendons au phare de Ferryland pour un pique-nique très spécial. Mais avant nous prenons le temps de visiter le site archéologique de la Colonie d’Avalon avec Anne qui nous sert de guide.  Elle est bilingue et se fait un plaisir de nous parler en français avec un accent très prononcé qui nous oblige à tendre l’oreille pour bien comprendre.  C’est une occasion pour elle de pratiquer sa deuxième langue et nous tenons à l’encourager.

Voulant coloniser le Nouveau Monde, George Calvert, qui devint pas la suite Lord Baltimore, acheta des terres qu’il appela Avalon (aujourd’hui Ferryland) en vue d’en faire un port de pêche prospère. Il y amena sa famille et des colons en 1628. L’hiver fut rigoureux et plusieurs colons tombèrent malades. Il mourut en 1632 et son fils Léonard partit en 1634 pour fonder la colonie du Maryland.

La majeure partie de l’île de Terre-Neuve est concédée en 1637 par le Roi d’Angleterre à Sir David Kirke pour le remercier d’avoir conquis Québec et la Nouvelle-France après de nombreuses attaques et le siège de la ville de Québec.  Le 19 juillet 1629, Champlain céda la ville aux Anglais, 21 ans après sa fondation.

Kirke prend possession d’Avalon et octroie des licences de taverne et perçoit des loyers pour les bâtisses. C’est ainsi que, contrairement à Calvert, il profita de Ferryland. En 1651, Kirke fut rappelé en Angleterre; les Calvert le poursuivirent afin de reprendre possession de leurs terres à Ferryland et il fut aussi accusé d’évasion fiscale pour les taxes qu’il avait perçues et n’avait pas remises au Roi.  Il mourut en prison en 1654.  Ce n’est pas nous, les Québécois, qui allons pleurer sur son sort.

La baie des pêcheurs à Ferryland

L'excavation de la plus grande maison de la Colonie d'Avalon

Le jardin bien garni des premiers colons

Serge sur le banc des menteurs

Il est presque midi et c’est l’heure de monter au phare pour le pique-nique spécial.  Nous montons en voiture par un chemin très étroit et rocailleux et nous nous stationnons dans un champ. Ensuite nous continuons à pied  pendant un kilomètre jusqu’au phare. C’est dans le phare que sont cuisinés et remis dans des paniers d’osier les pique-niques que nous achetons.  Quatre menus sont offerts, incluant une salade d’orzo, un sandwich gigantesque, un dessert et une limonade. J’ai choisi le sandwich au jambon, fromage brie et pomme verte tandis que Serge a pris le sandwich au poulet, céleri, oignon vert, amande et mangue  Nous recevons également une couverture pour pique-niquer dans l’herbe au bas du phare.  Le tout est servi dans de la vraie vaisselle et de vrais ustensiles.  Ce fut un délice, dans un décor merveilleux par une belle journée ensoleillée.  De plus, nous sommes repartis avec deux moitiés de sandwich qui feront notre lunch de demain. N’oubliez pas de venir au pique-nique de Ferryland lors de votre visite à Terre-Neuve et surtout faites une réservation car le nombre de paniers est limité. Les pique-niques sont du mercredi au dimanche seulement.

Le phare de Ferryland et ses pique-niqueurs

Notre pique-nique ce midi

Dans le plus beau restaurant

Nous passons la nuit en camping libre sur le site historique de la Colonie d’Avalon, devant la baie protégée où sont amarrés les petits bateaux de pêche.  Demain matin, nous serons aux premières loges pour voir partir et arriver les pêcheurs.